La saison la plus magnifique et la plus attendue par tous, hommes et bêtes, est sans aucun doute le printemps. Dès que le mois de mars s’annonce avec ses giboulées, une énergie inhabituelle commence à se faufiler à travers tous les organismes. Les champs verdissent, les arbres bourgeonnent, les oiseaux font entendre leurs joyeux chants et les animaux broutent la tendre herbe qui revêt les collines et les flancs des montagnes. Les personnes, longtemps encapuchonnées et tapies dans leurs demeures autour d’un feu de bois, ont maintenant le visage illuminé par un éternel sourire accueillant la belle saison.
Voilà les champs qui se drapent de leur tapis vert de blé et autre culture saisonnière, bariolés de taches mouvantes qui se ploient et se redressent continuellement. C’est les filles qui arrachent l’herbe pour la ramener aux bêtes. Les papillons, pressés de vivre, déploient leurs ailes bigarrées de couleurs défiant le plus hardi des peintres, embrassent d’une affection amoureuse les fleurs épanouies. Un tableau vivant, enivrant et aux couleurs chatoyantes, éclairé par un doux soleil se dessine continuellement pour le plaisir des yeux admiratifs. Et les oiseaux, cherchant la nourriture pour leurs oisillons, émettent une musique harmonieusement orchestrée, voulant chacun, comme dans une compétition, dominer le chant des autres et prouver par une mélodie inaccoutumée leur joie de vivre. De temps en temps, cependant, le braire d’un âne vient briser cette euphorie par son cri strident qui ne dure, fort heureusement, que quelques instants, mais suffisamment discordant pour désenchanter cette symphonie. Quelle magnificence ! La terre de nouveau redevient vivante après une longue léthargie. La vie reprend son élan après une hibernation qui semblait être la dernière heure. Toute la nature renait de son propre cendre comme le phénix. De la colline, on pouvait apercevoir toute ce lac de verdure se déployant à ses pieds. De toutes parts, les montagnes, tantôt grises, tantôt vertes, enlaçaient ce lac et l’enfermaient comme une muraille infranchissable. Aux flancs bas de celles-ci, les amandiers affichaient leurs jeunes pousses et leurs fleurs roses ou blanches dessinant un magnifique arrière plan. C’était la vie toute colorée, toute bigarrée, toute joyeuse qui surgissait soudainement face à la tyrannie du temps qui allait, malheureusement dans quelques mois semer les graines de la faucheuses rendant blême et blafard tout ce qui, il y a quelque temps, était la vie même sous tous ses aspects les plus spectaculaires. |